L’IA, avancée civilisationnelle, simple plus-value technique ou piège post-humaniste ?

C’est entendu : selon l’irrésistible rumeur ambiante, l’arrivée de l’intelligence artificielle équivaudrait pratiquement à l’introduction d’internet dans les foyers. On se plaît à énumérer les innombrables prouesses de cet outil, les gains de temps inouïs qu’il génère déjà au sein des entreprises, ou encore la fiabilité confondante de ses informations. Ainsi, l'IA générative augmenterait la productivité des travailleurs de 14 % (Bloomberg, 2023).

Que signifie cet engouement subit, dans le monde entier, pour cet acronyme magique ? IA. Quelles projections de nous-mêmes abandonne-t-on dans ce rêve à demi constitué ? Il est à craindre que les immenses potentialités techniques de l’outil soient prochainement noyées dans toutes les pratiques collatérales dont la malveillance humaine sera nécessairement prodigue. Déjà, la chronique des faits divers porte la trace de nouveaux phénomènes inquiétants.

Ainsi, dernièrement, un directeur de lycée de Baltimore a été démis de ses fonctions suite à la diffusion d’un enregistrement où l’on entendait sa voix égrener des propos racistes. Le hic, c’est qu’il s’agissait d’un montage « deepfake » réalisé par un collègue hostile. L'intelligence artificielle, comme son nom l'indique, est en passe de produire toutes sortes de réalités artificielles, lesquelles finiront fatalement par concurrencer le réel non artificiel.

Un facteur imprévu de perte du QI?

Notre intelligence humaine pourrait en être victime sur le long terme, si nous travestissons le formidable potentiel de l'IA. Un parallèle avec l'utilisation dangereuse et déraisonnable des formidables réseaux sociaux pourrait ainsi être tracé. 

Malgré son offre infinie d'options, l’intelligence artificielle est aussi grosse de menaces qui pourraient détruire carrières, réputations… Nous sommes face à un terrible dilemme : sommes-nous collectivement suffisamment matures pour intégrer l’IA à notre quotidien ?

C’est là tout le paradoxe de Dewey : en 1939, ce philosophe avait démontré l’existence d’un contraste étrange entre les évolutions scientifiques rapides d’une société, et la régression concomitante des capacités d’analyse objective des classes supérieures.

L’humanité aura-t-elle la sagesse nécessaire pour dompter à temps l’IA ? L’avenir nous l'enseignera bientôt. 

Olivier Truong

Conférencier en management, accompagnateur de dirigeants

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